Faites entrer Lacazette !

RANK’N’OL #S02E44. Oublié ou négligé par Didier Deschamps le matin même, Alexandre Lacazette s’en est allé qualifier l’OL tout seul face à Odessa (1-0). Plus pour faire rêver les copains que pour prouver qu’il est plus fort que Dimitri Payet. Ce qu’on appelle la sélection naturelle.

Olympique Lyonnais

Alexandre Lacazette, la sélection naturelle. (Photo Panoramic – Frédéric Chambert)

 

Jeudi 27  février 2014, 16e de finale retour de la Ligue Europa

Olympique Lyonnais – Tchernomorets Odessa 1-0

But : Lacazette (80e)

OL : A. Lopes – Miguel Lopes, Bisevac, Umtiti, Bedimo (avert., 41e) – Malbranque (Tolisso, 85e), Ferri, Fofana – Grenier (cap. ; avert., 74e) – Gomis (Briand, 81e), Lacazette (B. Koné, 87e). Entr. : Rémi Garde

 

Olympique Lyonnais

Le mode d’emploi : Let’s Rank’n’OL !

 

Olympique Lyonnais1. Alexandre Lacazette

Après ce but, comment ne pas voir le talent d’Alexandre Lacazette ? Encore faut-il s’accorder sur la façon de le voir. Il y a d’abord les supporters lyonnais qui en feraient bien une merveille façon Benzema. L’importance de leurs performances dans la réussite lyonnaise du moment rapproche sans doute les deux joueurs. Reste que le Kid de Mermoz a fini par exploser en grandissant dans l’ombre et en se raccrochant aux branches quand celui de Bron-Terraillon a toujours été attendu comme le nouvel enfant-roi du club. Du coup, quand il s’agit de convoquer les correspondances, mieux vaut se tourner vers Bernard Lacombe. Pour Lacazette, il n’a jamais cessé de voir Wiltord. Soit un attaquant qui respire tellement le football qu’il se montre à l’aise partout sans être complètement génial nulle part. Ca se tient, même si on reste persuadés que le football a suffisamment changé depuis Nino pour permettre à Lacazette d’y ajouter quelque chose d’autre. Du football YouTube, pour s’envoyer tous les buts de Luis Suarez en guise de manifeste des enragés. Du football Fifa 2014 pour reproduire cette accélération et retour vers l’intérieur avec la frappe enroulée (80e) qui permettait à Henry de planter les copains sur la Play’ dans les matchs Barça-Barça. Lacazette peut bien être la manette de Dieu, c’est encore à Deschamps que revient de lui préférer Rémy ou Payet. À ce compte-là, on préfère se dire qu’il ne l’a pas vu, pas pris.

Olympique Lyonnais2. Anthony Lopes

Même ceux qui en étaient intimement convaincus ont résisté. Ou fait comme si. Parce qu’une institution qui se respecte respecte aussi ses institutions. Mais aussi parce que la première moitié de saison 2012-13 avait été, et de loin, le moment le plus fun à l’OL depuis cinq ans : des gamins qui courraient dans tous les sens pour finir par trouver le chemin dans le regard noir d’un pêcheur taiseux ; un ancien enfant star revenu en courant du tunnel de la mort ; et, derrière tout ça, le gueulard tout heureux de poser enfin son survêt’ pour rectifier son destin à grands coups de manchettes. C’était bien mais c’est déjà très loin. Alors Rémy Vercoutre est retourné sur le banc. Numéro 2, numéro 1 de transition, numéro 1 bis : Anthony Lopes a franchi une étape à chaque match pour s’imposer comme l’incontestable. Un statut assumé haut la main face au Tchernomorets Odessa, avec toujours le même sens de la progression, du ballon bloqué (36e) à la claquette qui change tout (77e), jusqu’au défi aérien en un contre deux (et deux venus pour faire mal, 43e). Le tout parsemé de relances propres et audacieuses. Et c’est sûrement le plus bel hommage qu’il pouvait rendre à son rival. Car aujourd’hui Vercoutre n’est pas le plus mauvais des deux. C’est juste Lopes le meilleur.

Olympique Lyonnais3. Samuel Umtiti

Heureuse époque que celle où l’on peut encore apprécier tranquillement son Umtiti, entre gens bien, confinés dans leur snobisme. Un plaisir à peine perturbé par ces voix désagréables, forcément méprisables – et hautement méprisées : « Zouma saute quand même beaucoup plus haut. » Et bien qu’il saute ton Kurt, qu’il saute ! Il finira par retomber, mais sache qu’on n’a jamais cessé de le toiser. Parce qu’un Umtiti, même un Umtiti de 16e d’Europa League, ça commence par une transversale tellement bonne que même le contrôle de Miguel Lopes est livré avec. Et ça se poursuit par des duels gagnés au cerveau, des relances ajustées à l’œil et même quelques percées bien senties. Et pour une faute de goût, comme ce ballon perdu au milieu qui entraînera l’arrêt de Lopes devant Anderson Mineiro (77e), on gardera tout le reste. Car le jour où Umtiti ne sera plus aussi inconscient, il deviendra grand public. On aura alors triomphé, et soyez certains qu’on ne sera pas modestes. On regrettera juste cette période de lutte des classes. Enfin, de lutte de classe.

Olympique Lyonnais4. Clément Grenier

Une heure pour se faire détester encore plus par ceux qui n’y croiront jamais, qui lui reprocheront jusqu’à la fin des temps sa belle gueule, son jeu qui pue la facilité, au point de se permettre des passes dans le vide, de céder au vice suprême du jeu à haut risque qui finit presque toujours en perte de balle. Sans Gonalons et avec les courses à la limite de l’essoufflement du duo Ferri-Malbranque, c’est tout le bloc lyonnais qui manque de passer à la trappe derrière. Il reste encore une bonne demi-heure. Suffisant pour allumer son monde avec un premier geste qui rachète déjà tous les autres, sur cette talonnade qui finit en grand pont (57e). On se le repasserait bien à l’infini, mais il reste encore un match à gagner. Grenier s’en souvient-il seulement ? À sa place, on aurait déjà envoyé dans la seconde cette passe pour Lacazette sur ce contre de la 79e qu’on sent déjà décisif. A la sienne de place, Grenier laisse traîner. C’est qu’il a sans doute vu ce que les autres ne voient pas, un exploit d’Alex et une injustice qu’on répare. Grenier se paye la Crimée et c’est presque parfait. Du moins, pour continuer à rester ce joueur que l’on adore détester. Et mieux figurer dans l’instant qui suit celui que l’on déteste adorer.

Olympique Lyonnais5. Henri Bedimo

On a bien cherché à se rassurer comme on pouvait après sa disparition du dernier rendez-vous, face au LOSC. La faute à ce contrat qui l’envoie trois fois au tapis en dix minutes et signifie qu’à partir de maintenant il sera attendu. On veut d’abord y voir la preuve que Bedimo a désormais changé de statut à Lyon. Et on se force à oublier d’où il revient, une saison de réussie le temps d’un titre à Montpellier pour tout le reste de manqué. Pour éviter d’avoir à balancer le titre de meilleur latéral du moment qu’on a bien voulu lui envoyer sur la foi de stats flatteuses, on préfère encore s’en remettre aux matchs qui ont le mérite de remettre les joueurs à leur place. Celle de Bedimo est d’autant moins une évidence qu’il n’est plus un simple latéral qui se laisse aspirer au moindre débordement avant de se remettre à flirter avec la passe décisive (53e). Il en arrive à étirer le losange sur sa gauche et à prendre à son compte un peu de la part manquante du moment à Lyon, celle de Gourcuff. Ses appels à répétition, même ceux qui restent sans réponse, ramènent bien l’OL à cette réalité : Bédimo parvient à faire du couloir gauche le nouveau centre du jeu lyonnais. Là où les décisions vont se faire et les décalages se créer. Surréaliste ? Après tout, la gare de Perpignan est bien le centre du monde…

Par Pierre Prugneau et Serge Rezza

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