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Supporter l’OL loin de Lyon, mode d’emploi
- Publié le: 27 août 2014
#TEAMOL. Les fans de l’OL ne sont pas tous à Lyon et dans sa région. On en trouve aujourd’hui dans toute la France, et même au-delà. Mais alors comment vivent-ils leur passion loin de Gerland ? On leur a demandé.
Quand on s’imagine des supporters de l’Olympique Lyonnais hors de Lyon, on pense naturellement aux « exilés ». Ils ne sont pourtant pas les seuls. On a cherché à comprendre quelles sont les raisons qui ont poussé ces personnes à aimer l’OL. Et surtout à continuer de l’aimer à la fin de son hégémonie nationale.
Canal (+) historique
En épluchant les réponses de notre échantillon, il apparaît évidemment que cette passion pour l’OL est souvent survenue dans les fameuses sept années de gloire, ou juste avant. Basiquement, la notoriété hors des frontières du microcosme lyonnais a grandi à mesure que les matchs de l’équipe étaient diffusés de plus en plus régulièrement à la télé. Pour certains, tout a commencé le week-end : « Quand j’ai commencé vraiment à m’intéresser au foot à la télé, vers 8 ans, l’âge de ma première licence en club, j’ai commencé à regarder les matches de l’OL car mon père les suivait le dimanche soir sur Canal+, explique Rayane, Nordiste de 17 ans. C’est donc vers 2004 que j’ai commencé à regarder un, deux, trois, dix matches de l’OL… »
« Le départ de tous les galactiques m’a éloignée du Réal alors qu’à l’inverse, l’Euro U19 (diffusé sur Eurosport), avec Grenier, Lacazette et Fofana, m’a passionnée. » Birgitta, Suède
L’OL en promo à l’Euro et à la Coupe du monde
Au milieu des années 2000, c’est aussi grâce aux performances des Lyonnais avec leurs pays respectifs que l’OL s’est fait beaucoup connaître à l’étranger, notamment dans des pays moins habitués au football que la France. C’est le cas de Birgitta, Suédoise de 57 ans : « Pendant de longues années, j’ai regardé toutes les Coupe du monde et les Euro, sans pour autant m’être intéressée au football de club suédois, que je trouvais de trop faible qualité par rapport à ces grandes compétitions. Et l’absence de télé par satellite ne m’a pas incitée à franchir le pas du foot européen…. jusqu’en 2004 ! À l’achat du satellite, j’ai pu voir des matchs de joueurs que j’avais adorés pendant les compétitions internationales, comme Zidane, Figo… ou Wiltord, alors à Lyon. J’ai donc commencé à suivre les deux équipes. Le départ de tous les Galactiques m’a éloignée du Real alors qu’à l’inverse, l’Euro U19 (diffusé sur Eurosport), avec Grenier, Lacazette et Fofana, m’a passionnée. C’est là qu’on m’a proposé de démarrer un blog, chose que je n’ai acceptée que parce que je pouvais y parler de l’OL. » Rabeeta, 30 ans, suit la même lignée depuis Boston : « Je ne regardais que peu de sport. Mais j’ai voulu une fois trouver le même plaisir que les fans de sport, donc j’ai regardé la Coupe du monde 2006. Un joueur, Juninho, a attiré mon attention en marquant un but contre le Japon.
J’ai trouvé ça génial et j’ai voulu en savoir plus sur lui. J’ai appris à la fin de la Coupe du monde qu’il jouait à l’OL. Par chance, les chaînes de télé américaines avaient les droits de la L1 ; du coup je pouvais suivre les matchs de l’OL. Et plus j’en voyais, plus je tombais amoureuse du foot. Et de l’OL. »
Les passions tiennent ainsi souvent à peu de choses. Et ce n’est pas Benjamin, 21 ans, habitant à Soissons, dans l’Aisne qui nous fera mentir : « Vers 5-6 ans, en vacances en Vendée, mes parents ont dû m’acheter une casquette pour me protéger du soleil. On s’arrête à un stand sur le marché d’été de la ville, j’avais le choix entre OM, PSG, ASM, Lens et l’OL. Et j’ai choisi celle de l’OL, au hasard. Voilà, la passion pour l’OL est né comme comme ça, et elle est vraiment devenue réelle lors de OL-ASM en finale de la Coupe de la Ligue 2001. Mon père et mon grand-père étaient supporters monégasques et je me suis mis contre eux pour les embêter. »
Merci Gourcuff…
Assez étrangement, certains sont en revanche devenus fans de l’OL après la fin du règne lyonnais sur l’hexagone. Pour Aline, 17 ans, l’élément déclencheur fut Yoann Gourcuff : « À la base, j’étais fan de Yoann Gourcuff donc quand il est arrivé j’ai supporté ce club, puis je suis tombé amoureuse de cette équipe, de toutes les émotions qu’elle m’a fait vivre. Et si Gourcuff devait partir, je continuerai à supporter ce club car je l’aime. »
« C’est la chose amusante avec l’amour : il n’y a aucune logique avec lui. » Rabeeta, Boston
Le tri a été fait
Mais pour ces supporters qui n’ont jamais vécu à Lyon, l’histoire aurait pu s’arrêter en 2009, sous Puel, Keita et Mensah. C’est bien ce qui est arrivé à nombre d’entre eux partout en France, donnant ainsi naissance à Lyon à l’adage : « Le footix n’est pas celui qui est arrivé en 2002, mais celui qui est parti en 2009. » Paul, 35 ans, expatrié à Paris, met très bien ce phénomène en lumière : « Je cours deux fois par semaine pas loin de chez moi et dans le parc où je vais, j’ai toujours couru avec des maillots de l’OL sur le dos sans jamais avoir de remarque jusqu’à 2010-2011. D’ailleurs, il y a un club de foot pas loin de chez moi et l’OL était le maillot le plus porté par ceux qui s’entraînaient quand je courais. Depuis trois ou quatre ans, le maillot de l’OL a presque disparu de Châtelet et des terrains d’entraînements au profit de celui du PSG (ce sont les mêmes personnes, hein) et c’est presque impossible de porter un maillot de l’OL pour courir ou flâner sans se faire insulter ou provoquer. »
Marqués à vie
Cependant, beaucoup sont également restés supporters de l’OL depuis. La raison ? Essentiellement la fidélité. Impossible d’effacer ces années d’or d’un revers de la main, que ce soit au niveau affectif (« Il s’en est passé des choses, des émotions avec l’OL et je me suis même pas posé la question si je continuais à supporter l’OL ou pas », pour Dylan, 17 ans, de Saint-Brieuc) ou tout simplement au niveau de l’investissement personnel : « Maintenant que j’en connais tant sur cette équipe, je ne peux jeter tout ce savoir à la poubelle », nous dit Birgitta. De là à pouvoir tenter l’analogie entre supporterisme acharné et amour, il n’y a qu’un pas que Rayane n’hésite pas à franchir : « Pourquoi supporter l’OL même en crise ? Tout simplement parce que quand on aime vraiment quelque chose (ou quelqu’un), on lui reste fidèle jusqu’au bout. Je ne ressens de l’amour véritable que pour ce club, les autres ne me feront jamais frissonner autant que celui-ci le fait. »
« Twitter est la première source d’infos pour moi, grâce notamment aux Lyonnais qui jouent le jeu à Tola Vologe. » Paul, Paris
Le projet lyonnais, ambitieux bien que réalisé avec des bouts de ficelles, a également beaucoup joué chez eux, comme chez Marc, 15 ans : « J’ai continué à supporter l’OL après l’hégémonie car j’ai vu de suite que le club avait l’ambition de faire jouer les jeunes du centre de formation, ce qui m’a plu. Il y a aussi eu l’arrivée de Rémi Garde en tant qu’entraîneur. » Pareil pour la Bayonnaise Bonnie, 17 ans : « J’aime les joueurs, l’état d’esprit, le projet du centre de formation… »
Du stress et du stream
Qu’ils aient grandi à Lyon ou non, tous se voient quoi qu’il arrive confrontés au même problème : comment supporter son club à distance ?
« J’insulte Canal le dimanche soir quand je me rends compte qu’ils diffusent encore l’OM. » Guillaume, Paris
Cécile, 24 ans, résume bien la situation : « Au jour le jour, par les médias, Internet parce qu’on a la chance d’être au XXIe siècle. Pour les matchs : télé quand c’est diffusé et que j’ai une télé, streaming la plupart du temps », sans oublier la radio. « À l’internat au lycée, j’avais un baladeur radio pour écouter les matchs de Ligue des champions cachée sous ma couette. J’ai passé quelques soirées assez stressantes comme ça. »
Mais à l’étranger, le streaming est la règle. Enfin, quand tout va bien. « Si je suis chanceuse, j’arrive à trouver un lien, raconte l’Américaine Rabeeta. Sinon, dans le pire des cas, j’arrive à voir le résumé, ainsi que de nombreux compte-rendus du match. » Autre complication : le décalage horaire. « Les matchs du dimanche à 14 heures, avec six heures de moins, je ne me levais pas pour les voir… » concède Cyril, 23 ans, qui a vécu à Montréal.
La chaîne de l’info
Il faut donc aller chercher l’info où elle se trouve. Pas un souci pour les francophones, un peu plus pour les autres. C’est pour cela que certains ont pris les choses en main, comme Rabeeta qui gère Lyon Offside, ou bien Birgitta, qui rédige tous les articles liés à l’OL sur le site suédois Svenska Fans. Et pour tous, du moins pour la plupart, les réseaux sociaux servent de lien avec la base. Pour Paul, l’expatrié parisien, « Twitter est la première source d’infos pour moi, grâce notamment aux Lyonnais qui jouent le jeu à Tola Vologe ».
« Ceux qui sont vraiment supporters respectent beaucoup le fait de continuer à soutenir ton club alors que tu es à Paris depuis des années et que l’OL ne truste plus les premières places du classement. » Paul, Paris
La télévision, elle, a au final été peu mentionnée, sauf pour en dire du mal, à l’image de Guillaume, un Parisien d’origine havraise de 33 ans : « Je streame la Ligue Europa et j’insulte Canal + le dimanche soir quand je me rends compte qu’ils diffusent encore l’OM. » Ce qui n’ira pas en s’arrangeant cette saison, puisque l’OL a perdu son statut de Top Club auprès des diffuseurs au profit de… l’ASSE.
Le regard des autres
Mais, plus que les problèmes d’ordre matériel, ces supporters doivent surtout composer avec un environnement qui n’est pas toujours propice à l’exercice de leur passion, quand il ne lui est pas carrément hostile. C’est notamment le cas de Hugo, Roannais de 17 ans, qui se retrouve souvent entouré de stéphanois : « Mon père est un fan des Verts car il est né dans la Loire et, habitant dans la Loire, je me fais charrier par mes potes. Mais je le vis bien, j’en rigole plus que ça m’attriste. » Une vision que partage Cyril, décidément très mobile : « Pendant mes études, j’ai trouvé des supporters de l’OL mais aussi d’un peu tous les autres clubs de L1 et L2. Du coup, on se chambre plus de manière bon enfant, surtout que j’ai tendance à éviter les supporters die hard sans second degré. » De toute façon, pour Paul, « ceux qui sont vraiment supporters respectent beaucoup le fait de continuer à soutenir ton club alors que tu es à Paris depuis des années et qu’il ne truste plus les premières places du classement. Faut juste dépasser le stade du ‘Ah ouais, tu supportes l’OL depuis 2002, c’est ça ?… »
« Au niveau professionnel, c’est parfois un peu difficile face à l’armada marseillo-parisienne, mais j’ai trouvé un supporter stéphanois sur qui me venger ! » Stanislas, Guadeloupe
Le charme du milieu hostile
L’environnement peut parfois être très envahissant, bien que très instructif. C’est ce que vit Rémi, 24 ans, à Marseille : « Chez nous, on l’a vu cette année encore, les gens sont contents de voir le club repartir sur des bases financières saines, avec des joueurs du cru, des entraîneurs liés au club, etc. À Marseille, c’est beaucoup plus pulsionnel, court-termiste, mais c’est aussi l’histoire du club qui fait ça. C’est vraiment très agréable à observer, et de s’imprégner de cette culture. C’est donc impossible de faire vivre l’OL à travers sa passion ici, mais en tant qu’amateur de football, on prend beaucoup de plaisir à vivre à Marseille. »
Tout n’est au fond qu’une question de volonté, celle de ne jamais se sentir atteint par ce regard extérieur de temps en temps véhément. Et pourquoi pas, en dernier recours faire comme Stanislas, 40 ans, qui vit en Guadeloupe : « Au niveau professionnel, c’est parfois un peu difficile face à l’armada marseillo-parisienne, mais j’ai trouvé un supporter stéphanois sur qui me venger ! »
Famille résignée et coloc’ fan du PSV
Loin de Lyon, il est parfois compliqué de se faire comprendre de son entourage. Du côté de Reims, Julien, 22 ans, a mis tout le monde au pli : « Tout le monde sait que je suis dingue de l’OL. Ma famille est habituée, voire résignée. Et moi je le vis parfaitement bien ! » Pas Marion, 15 ans, de Montpellier : « Pour mes parents, c’est un calvaire ! Je vis en fonction de l’OL : quand il y a un match à 17 heures, on doit être rentrés avant 17 heures. Lorsqu’il y a un match à 14 heures, je ne sors pas de l’après-midi. »
« J’essaye de caler mes visites à la famille en m’assurant de voir un match ou deux… » Stanislas, Guadeloupe
Le troisième virage de Gerland
Le stade. Ce lieu privilégié où le supporter se sent intimement lié aux acteurs et où il sent qu’il peut avoir un impact sur le match. Pour les Lyonnais, Gerland est un passage obligé. Mais pour les autres, c’est forcément plus compliqué. Il y a ceux qui contournent le problème en allant voir des matchs de l’OL à l’extérieur près de chez eux, comme Cécile : « Dès que l’OL vient jouer dans ma ville, je vais voir le match. Donc tous les ans à Chaban-Delmas. Du coup, je peux quand même me vanter d’avoir été présente quand on s’est qualifié en demi-finale de Ligue des champions ! J’étais même à Santiago Bernabeu la dernière fois qu’on y est allé parce que j’habitais à Madrid cette année-là. Globalement, j’arrive à voir jouer l’OL au moins une fois par an. »
« J’ai du mal à comprendre comment on peut aimer durablement un club sans s’intéresser à la ville. » Romain, Auxerre
Pour les expatriés, l’idée est la même. « J’essaye de caler mes visites à la famille en m’assurant de voir un match ou deux… » assume Stanislas.
De la passion pour l’OL à l’amour pour Lyon
À force de parler de supporters de l’OL « sans attache avec la ville » ou « non-Lyonnais », on finit par se rendre compte qu’on se trompe. Au fil des entretiens, on s’aperçoit que la « lyonnitude » gagne les rangs de ces supporters venus d’ailleurs. Pour Romain, Auxerrois de 18 ans, rien de plus normal : « J’ai du mal à comprendre comment on peut aimer durablement un club sans s’intéresser à la ville. Je l’ai visitée à chaque fois que je suis venu à Gerland. » D’autres, comme Rayane, ne peuvent trop l’expliquer, mais constatent la même chose : « L’OL a effectivement suscité chez moi un intérêt certain pour la magnifique ville qu’est Lyon. J’ai eu ‘la chance’ de me perdre dans les hauteurs et dans le Vieux Lyon et donc pouvoir marcher en découvrant. J’ai envie de venir y faire mes études et même de m’y installer durablement. »
Ils sont l’Olympique Lyonnais
Si l’association entre le club et la ville rapproche les supporters de loin de ceux du coin, ces derniers ont leur spécificité : ils sont investis d’une mission. Pas d’évangélisation, mais de représentation. Il ne fait aucun doute que le « recrutement » de supporters s’est accru avec les années de gloire. Comme ce fut le cas pour Saint-Étienne il y a quarante ans ou l’OM au début des années 90. Aujourd’hui, quelles que soient les raisons qui les ont amenés vers l’OL – ou à partir de Lyon -, ce sont aussi eux qui ont la charge d’en faire une institution. Y compris dans les mauvais moments. Surtout dans les mauvais moments. Car c’est bien quand leur équipe est la plus mauvaise qu’on reconnaît les meilleurs supporters. Et si le supporterisme lyonnais s’apprêtait à connaître son âge d’or ?
Hugo Païen-Bourré
Un grand merci à tous les sondés : LyonOffside, BoboGonalons, tiim_ol, JuAllderdice, Bmontier, AlineYoClem, Bmalmborg, Marion_OL69, Glanoiselee, Hugo_Anidex, NicolasSch, Atillovallaf, Mayda, MarcoDu77, Demonium62, StanMourdon, Justus, LyonRemi, ScottRayane, theo369 ainsi qu’à tous les autres qui se sont proposés.