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OL, le talent aiguille
- Publié le: 20 octobre 2014
RANK’N’OL #S03E14. L’Olympique Lyonnais a fait bien plus qu’exorciser le 5-1 de la honte ramassé la saison dernière à la Mosson. Il a fait souffler sur la ville un peu plus fort le vent de movida ramené par Almodovar pour le Festival des Lumières. Entre Fekir qui devient la Fleur’ (Di Nallo) de mon secret, Gourcuff qui enfin parle avec l’OL et la flamme qu’on sent au bord de la crise de nerfs (six cartons jaunes), c’est le talent qui déborde de partout et le Rank qui s’offre un shoot d’hystérie joyeuse.
Le match : La bombe automnique
Le mode d’emploi : Let’s Rank’n’OL !
1. Nabil Fekir
Si le retour dans le jeu et dans les ambitions prend des allures de petite movida côté lyonnais, alors Fekir y est pour beaucoup. Les chiffres ne disent rien d’autre : septième titularisation de la saison, quatre buts au compteur et toujours aucune défaite (cinq victoires pour deux nuls). La limite entre l’amulette porte-bonheur et l’homme providentiel est bien trop étroite pour ce prodige que Nabilon parvient à reproduire d’un match à l’autre. D’autant plus fort qu’il n’éclate jamais là où l’attend. Pour cette fois, ce sera d’abord à l’ombre des premiers échanges entre Gourcuff et Lacazette. On manque de s’impatienter avant de comprendre sur cette première apparition fracassante de la partie, raid qui part du rond central et se termine dans la surface adverse (25e). D’un bout à l’autre de l’action, Fekir se promène avec deux défenseurs sur le dos. Il remet ça après un premier débordement de Jallet côté droit (28e), avant d’aller secouer Congré sur la gauche (32e), pour effacer Jourdren d’un piqué soyeux (38e). À elle seule, cette succession raconte la domination jouissive des Lyonnais en fin de première période. Elle en dit surtout beaucoup plus sur l’intelligence du joueur qui passe son premier quart temps à caler les appels qui sauront mettre en l’air toute une défense. Fekir sait trop d’où il vient pour s’imaginer où il pourrait aller. C’est pour ça qu’il s’emploie à ravir son monde comme il l’a fait jusque-là. En cachant son jeu.
2. Alexandre Lacazette
Il pourrait presque paraître encombrant. On veut parler de ce but que Lacazette finit par planter dans une fin de match que la défense montpelliéraine finit par lâcher de guerre lasse. D’abord parce que ce quatrième but doit tout à une passe, celle de Bedimo, et à une accélération, celle de N’Jie (82e). Ensuite parce qu’il soigne juste ce qu’il faut les stats de l’attaquant lyonnais pour réduire le duel entre olympiques hauts de dimanche prochain à celui que de se livreraient leurs deux buteurs du moment. Certes, le Kid de Mermoz mérite plus que jamais sa place en haut de l’affiche. Encore faut-il que ce soit pour les bonnes raisons. Lesquelles tiennent toutes dans le match livré par le n°10 de l’OL. Au point de ne plus savoir par quel bout le prendre : ce pressing mené jusqu’à étouffement sur les relances adverses ? Ces combinaisons multipliées à l’infini qui libèrent bien plus d’espace qu’il n’en faut à une passe de Ferri pour briser les lignes (35e) ? Ces relais qui envoient Fekir piquer Jourdren (38e) ? Ces dribbles et accélérations qui font le tour de la surface avant de trouver N’Jie libre de tout marquage (77e) ? Il y en aura toujours pour valider l’idée qu’on construit des équipes autour d’un attaquant. Lacazette préfère démonter le mythe pour mieux reconstruire l’équipe autour de lui, à la manière d’un type de 20 balais. En réseau.
3. Yoann Gourcuff
Il peut en aller d’une relation entre un club et un joueur comme dans certains couples. Il faut que le lien ne tienne plus qu’à un fil et que la rupture soit à l’ordre du jour pour se donner le droit de rejouer à intervalles réguliers le coup des retrouvailles – intenses de préférence. Au moment de s’expliquer sur tous les tourments qui ont précédé ce premier acte d’un retour en grand, Gourcuff a de nouveau sorti la rengaine du corps qui aurait ses raisons que la raison n’a pas. Avant de disséquer le jeu et la domination qui vient de précéder sans qu’on lui demande quoi que ce soit. Une façon de remettre les choses à leur place – on parle de jeu et de rien d’autre avec Yoyo… –, genre d’enfumage dont le joueur aurait le secret. On pourrait y voir aussi (pour une fois) un aveu, celui d’un type tellement rompu à l’art de l’analyse qu’il balancerait ses retours non plus en fonction des diagnostics médicaux, mais à partir de ceux portés sur le jeu du moment. Comme si son retour en grand dépendait de celui du collectif, et non l’inverse. Si le premier doublé claqué en cinq ans peut à nouveau raviver l’idée d’un retour de flamme après bien des crises de nerfs, il vient surtout ponctuer deux séquences qui partent de loin et arrivent par la droite (36e et 47e). Gourcuff reste comme souvent en retrait, mais il a déjà pris la mesure des mouvements qui s’ordonnent autour de lui. On a coutume de dire qu’il faut être deux pour se remettre à croire à un destin commun. Avec Yoyo, on sait maintenant qu’il faut être onze.
4. Corentin Tolisso + Jordan Ferri
Elle n’est pas loin de passer inaperçue. Faut dire aussi que c’est le but de cette innovation qui confie le poste de relayeur à deux gabarits identiques mais suffisamment complémentaires pour compenser leurs absences et leurs carences communes. Un peu à la façon du Barça qui a inventé un genre de milieu à tout faire autour du monstre à deux têtes Xaviniesta, c’est d’abord contraint que Fournier s’en est remis à cette division des tâches dans le jeu de transition. La faute à une cheville, celle de Fofana, qui n’a pas résisté à l’idée qu’on continue de se faire du milieu box to box. La nouveauté peut très bien ne rester qu’une solution par défaut, elle n’en fixe pas moins les rôles avec une netteté qui pouvait parfois manquer au losange. À sa base où la couverture de Tolisso permet à Gonalons de tenir sa défense à la façon d’un troisième central suffisamment avancé pour soigner son volume de récup’ (25 ballons gagnés) et s’épargner les relances au hasard. À son sommet où le meneur n’est plus forcément ce coffre pas si fort qu’il faut planquer comme Pirlo, mais peut reprendre la place qu’il n’aurait jamais dû cesser d’occuper, celle de joueur suffisamment décisif pour s’occuper de l’attaque. C’est ainsi que la passe de Ferri finit par libérer Gourcuff et Fekir. Et nous rappelle à cette règle qu’il n’y a de festival des lumières sans son corollaire, les seuls obscurs.
5. Christophe Jallet
À l’heure où il faut célébrer la jeunesse triomphante lyonnaise, surtout quand elle a été formée pour attaquer, Christophe Jallet figure comme l’exception qui fait vivre la règle. Pas seulement en qualité de trentenaire à l’allure débonnaire à qui on envoie du Jaja sur le terrain. Mais bien parce que les défenses adverses ne paraissent jamais autant débordées que lorsque c’est l’ancien Merlu qui s’y colle. Les trois premiers buts viennent de là : une prise de couloir avec appui sur Fekir pour le premier (35e), une passe qui lance Lacazette sur le deuxième (38e) et un départ sur une montée de Bisevac qui trouve Gourcuff en retrait (47e). Cette seule réussite vient rappeler que si la formation lyonnaise se met à faire des étincelles, il a fallu attendre que la cellule recrutement devienne le parent pauvre pour se remettre à faire son boulot sur cette idée toute simple qu’il ne peut y avoir de mauvaise recrue quand il n’y en a plus qu’une. Après le coup Bédimonstre de la saison dernière, c’est au tour de Jallet de figurer comme la grande idée qui manquait au dispositif lyonnais pour s’épanouir un peu plus en losange. Difficile de parler de révélation quand Ancelotti est passé par là pour célébrer « le meilleur latéral droit de France » et qu’il n’a fallu que dix journées à l’effectif pour s’enrichir de nouvelles têtes aussi talentueuses qu’improbables (Fekir, N’Jie, Ferri, Tolisso). Raison de plus pour rappeler que le talent n’est pas de percer, mais bien de confirmer.
Par Serge Rezza
Retrouvez le Rank’n’OL sur OL Dirty Bastards et le Libéro Lyon.
(Photo Anthony Bibard – FEP / Panoramic)