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OL : Ferri, Gonalons et Tolisso, le meilleur milieu de Ligue 1 ?
- Publié le: 31 janvier 2015
TACTIQUE. Alors que l’OL s’apprête à disputer deux matchs capitaux contre Monaco puis le PSG, le supporter lyonnais cherche des raisons d’espérer – surtout en l’absence d’Alexandre Lacazette. Mais si l’Olympique Lyonnais va aborder ces deux rencontres en position de leader de la Ligue 1, il le doit aussi à un collectif qui tourne à plein régime. Et notamment à un milieu à la base duquel s’expriment parfaitement Maxime Gonalons, Jordan Ferri et Corentin Tolisso. Décryptage de l’activité de ce triangle, véritable clé de la réussite lyonnaise cette saison.
Quand le bricolage devient de l’art
Alors que l’on célèbre le triste premier anniversaire de la fin du « losange doré » (Gonalons-Fofana-Grenier-Gourcuff) du cœur de l’hiver dernier, disparu en même temps que ses deux « pointes écartées » du quadrilatère, ce qui ressemblait au départ à un assemblage de fortune est en train de devenir le point fort de cet OL 2014-2015. Gonalons n’est pas une nouveauté, mais l’association entre Ferri et Tolisso, elle, l’est. Beaucoup commencent à réaliser qu’il se passe quelque chose lorsque ces trois-là sont alignés derrière le meneur du jour (qu’il se prénomme Yoann, Rachid, Nabil ou Steed), sans pouvoir réellement l’expliquer.
Nous allons tenter de mesurer l’impact du triangle, de comprendre comment, et pourquoi, ces trois-là rendent l’OL meilleur. Et de fait donner des raisons d’aborder ces deux matchs à venir avec davantage d’optimisme.
Un bilan comptable sans équivoque
Si Hubert Fournier a reconduit le losange de Rémi Garde lors de la majorité des matches de l’OL cette saison, les blessures et les états de forme l’ont forcé à aligner plusieurs combinaisons de joueurs pour composer son milieu de terrain. Mais les chiffres montrent qu’il existe véritablement deux OL : celui avec le triangle Gonalons-Ferri-Tolisso, et celui sans. Bien entendu, de nombreux autres facteurs entrent en ligne de compte – mais les chiffres sont trop édifiants pour relever de la simple coïncidence.
Sans Ferri – Gonalons – Tolisso
L’OL a débuté onze matchs de Ligue 1 sans ces trois joueurs au milieu du terrain, notamment en début de saison, lorsque Tolisso remplaçait un Bedimo blessé au poste d’arrière gauche. Avec eux, l’OL attaque moins bien, prend plus de buts et – forcément – empoche moins de points.
1, 73 points par match (1,64 but pour, 1,09 contre)
Avec Ferri – Gonalons – Tolisso
Onze matchs également (dont le derby) dans cette configuration, et une moyenne de points absolument ébouriffante, alimentée par une attaque prolifique (supérieure à 2,5 buts par match) ainsi qu’une défense bien plus hermétique (moins d’un but encaissé tous les deux matches en moyenne).
2,55 points par match (2,64 buts pour, 0.45 contre)
Les chiffres sont là, mais il semble maintenant important d’essayer de comprendre pourquoi l’équipe démontre une telle efficacité dans les deux surfaces lorsqu’elle aligne son milieu-type, et surtout comment la formule fonctionne.
Le losange de l’année dernière se montrait efficace notamment en raison de la complémentarité et du partage des rôles entre ses membres : Gonalons pour défendre et équilibrer le bloc, Grenier pour aider à la transition attaque-défense, et Fofana qui alternait constamment entre les deux registres au gré de la physionomie du match. Devant eux, Gourcuff jouait entre les lignes et servait de point d’appui au reste du triangle.
Le secteur offensif : projeter le bloc vers l’avant
La possession, le nerf de la guerre
Le plus important se trouve peut-être ici. L’OL n’est pas la meilleure attaque de Ligue 1 par hasard : elle se base sur une possession en moyenne supérieure à celle de son adversaire (55%) et le milieu tient un rôle clé, puisque c’est lui qui a la charge de récupérer, conserver et transmettre le ballon.
La précision de passe de Gonalons, Ferri et Tolisso, entre 85% et 90%, est exemplaire. Le rôle de Gonalons, premier relanceur devant la défense, est central afin de maintenir la possession et débuter la transition entre défense et attaque. En Ligue 1, seuls Verratti et Thiago Motta ont une précision de passe légèrement supérieure (92%) à celle du capitaine lyonnais. Bien qu’évoluant plus haut sur le terrain, Ferri et Tolisso affichent un chiffre (85%) qui les place directement parmi les milieux les plus précis du championnat – dans un top 10 des joueurs de Ligue 1 où l’on retrouve Imbula, Lemoine, Pastore, Mavuba, etc.
Influence : Ferri et la « droite dure »
Malgré son positionnement, en général à la droite du losange, Jordan Ferri est celui qui touche le plus de ballons : quasi 70 ballons par rencontre en moyenne. Son influence, ainsi que la présence de Christophe Jallet à ses côtés, font souvent pencher le jeu de l’OL à droite, alors que le losange de l’année dernière préférait la gauche sous l’impulsion de Bedimo et de Grenier. Gonalons le suit avec quasiment 55 ballons par match. Enfin, Tolisso affiche une influence légèrement plus limitée que Ferri, avec une quinzaine de ballons touchés en moins en moyenne.
La passe fait toute la différence
De par sa position reculée, Gonalons joue naturellement plus vers l’avant, mais également plus long (21 mètres en moyenne). Une statistique à bien remettre en perspective avec le taux de réussite cité plus haut. Maxime Gonalons réussit 90% de passes en moyenne expédiée à plus de 20 mètres. Une statistique énorme. En comparaison, il est plus simple pour Motta d’être plus précis car il joue en moyenne à 16 mètres de distance, à l’image d’un PSG qui fait circuler latéralement le ballon et se projette moins rapidement vers l’avant que le bloc lyonnais. Cette longueur de passe moyenne s’explique par le système lyonnais : souvent, en phase de relance, Gonalons va chercher à trouver ses latéraux, garants de l’occupation de la largeur dans le 4-4-2 en losange.
Il également intéressant de comparer la façon dont Tolisso et Ferri animent « leur » côté du losange : Ferri joue plus vers l’avant, et un peu plus long que Tolisso.
Tous décisifs, chacun dans leur rôle
Avec seulement trois joueurs purement offensifs (un meneur et deux pointes) dans le système, il est capital que les milieux excentrés et les latéraux participent au jeu offensif. La répartition des rôles semble plutôt claire : le rôle offensif de Gonalons est réduit à la portion congrue. Le capitaine lyonnais crée en moyenne un peu plus d’une occasion tous les trois matches – même chose au niveau des frappes (qui terminent en général en virage nord supérieur).
Tolisso et surtout Ferri affichent une vraie volonté offensive. Ferri n’est pas seulement celui qui frappe le plus (presque deux fois par match, la plupart du temps de loin), mais il génère aussi une occasion par match. On mesure ici la capacité à créer une occasion, sans nécessairement qu’elle se termine par un but (elle permet d’enlever l’adresse de l’attaquant de l’équation – disons qu’une passe-clé pour Lacazette aura plus de chances de se transformer en passe décisive qu’une passe-clé pour N’Jie). Tolisso reste cependant le plus adroit devant le but – déjà quatre buts inscrits cette saison – tandis que Ferri a adressé quatre passes décisives et marqué une fois.
Une action décisive est souvent précédée d’une prise de risque, et Ferri est celui qui présente la meilleure capacité à éliminer en un-contre-un : 1,14 dribble réussi par match en moyenne (ses dribbles passent dans 73% des cas). Tolisso semble plus timide à ce niveau : seulement 0,34 dribble réussi par match, ce qui peut se comprendre lorsque l’on voit qu’il échoue dans 54% des cas quand il tente d’éliminer balle au pied. Tolisso dispose donc d’une vraie marge de progression à ce niveau. Gonalons, lui, se situe entre les deux mais, de par sa position, il a plutôt tendance à tenter des dribbles « de relance » pour échapper à un premier pressing adverse, tandis que Tolisso ou Ferri auront plutôt tendance à dribbler pour éliminer en phase d’attaque.
Prise de risque calculée et intelligence tactique : les vases communiquants
La répartition des rôles au niveau offensif semble claire : Gonalons reste concentré sur ses tâches défensives, Ferri cherche à apporter plus de danger, et Tolisso se situe à mi-chemin entre les deux, pour équilibrer le bloc et compenser les prises de risque de Ferri, ou apporter un soutien en « seconde vague » comme ici face à Metz (flèche rouge) lorsque Ferri (en bleu) reçoit le ballon aux abords de la surface.
En dehors de situations spécifiques, l’un compense en général toujours la montée de l’autre – lorsque Ferri est haut, Tolisso est en général 10 à 15 mètres derrière, et vice-versa –, mais suffisamment haut pour devenir rapidement une solution en cas de besoin.
Ici, face à Lens, Tolisso (rouge) offre une solution à Jallet en réalisant un appel dans l’axe, dans une zone dégagée. Ferri (bleu) se tient en retrait.
Quelle contribution défensive ?
On l’a vu, le replacement et la capacité à bouger en bloc et à compenser les mouvements de l’autre milieu sont des éléments clefs pour équilibrer un milieu en losange. Mais on demande aussi aux joueurs du milieu d’être performants dans leur capacité à gagner des duels et récupérer des ballons.
Jeu de tête et duels gagnés : Washing Maxime lave plus blanc
À ce niveau, Gonalons est le roi des airs. Avec 57% de duels aériens gagnés, il rend difficile les longs dégagements adverses dans sa zone. Dans le cas où un adversaire chercherait à jouer long sur les côtés, qu’il vise la droite : Ferri perd 82% de ses duels aériens du haut de son mètre 72. Tolisso, qui dépasse 1,80 m, est déjà plus imposant dans les airs, avec quasiment 50% de duels remportés.
Dans les duels, Gonalons est de très loin le plus performant dans la récupération du ballon. Avec plus de trois duels gagnés et 2,86 interceptions, il est vital à l’OL pour sa capacité à déposséder l’adversaire du ballon. Jouant dans une zone très exposée, il perd également des duels – près de trois par match. Sur le reste des indicateurs défensifs, Ferri et Tolisso sont très proches – Ferri (22 ans) gagnant un peu plus de duels que son cadet (20 ans).
Sans faute (ou presque)
L’un des domaines dans lequel Gonalons a le plus progressé est à capacité à défendre proprement. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il est le plus propre des trois, avec 1,29 faute par match, là où Ferri est à 1,80.
Cela se répercute du coup directement sur les cartons. Ferri est le plus averti (4 cartons jaunes en championnat), là où Tolisso est blanc comme neige. Pas encore assez vicieux peut-être ? La statistique la plus fascinante est celle des fautes subies : Gonalons subit plus de fautes qu’il n’en commet. Cela illustre sa capacité à dominer ses adversaires et régner sur sa zone du terrain. En comparaison, Motta commet plus de fautes (1,52 par match) et en provoque beaucoup moins (0,86). Enfin, Ferri attire les fautes (1,74 par match), corollaire direct de sa volonté de prendre des risques et de jouer vers l’avant.
Fofana et Grenier vont devoir s’accrocher
La machine du milieu lyonnais est d’une efficacité redoutable. Ses deux forces principales aujourd’hui sont sa capacité à répartir parfaitement les rôles entre ces trois joueurs, mais aussi la propension qu’ils ont à maîtriser les exigences de leurs rôles. L’impact défensif tout comme la capacité à jouer propre de Maxime Gonalons sont aujourd’hui ahurissantes. Il est la clé de voûte du système, alimentant le jeu de possession de l’OL par sa capacité à récupérer et ressortir le ballon. À ses côtés, Ferri et Tolisso s’épanouissent dans deux rôles complémentaires : le premier plus porté vers l’avant, le second à mi-chemin entre Gonalons et lui. Certains pourront argumenter que Ferri joue la partition de Grenier l’an dernier, avec un peu moins de brio offensif mais bien plus de constance défensive – et ils auront sûrement raison.
Ce milieu fait exactement ce dont l’OL à besoin : il protège sa défense, maintient la possession de balle, alimente et soutient le compartiment offensif de l’équipe. Son rôle est fondamental dans la saison réalisée par Fekir ou Lacazette, car ils travaillent en permanence pour que ceux-ci reçoivent le plus de ballons possible, dans les meilleures conditions et avec un soutien optimal autour d’eux.
Le plus beau compliment qu’on puisse faire à Ferri et Tolisso ? Même avec un Grenier et un Fofana en pleine forme, il n’est pas évident qu’il soit nécessaire de toucher au système actuel.
Étienne M.
(Photos Frédéric Chambert et Nolwenn Le Gouic – Panoramic)
Source : Squawka & Squawka Comparison Matrix
Note : toutes les statistiques sont une moyenne sur 90 minutes, pour éliminer l’impact de remplacements ou entrées en cours de match