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Jordan Nkololo, jongleur compulsif
- Publié le: 10 mars 2018
INCULTURE FOOT. Chaque semaine, on vous dresse le portrait d’un adversaire à suivre avant le match de Ligue 1 de l’OL. Du côté du Stade Malherbe de Caen, il faudra se méfier de Jordan Nkololo et ses 7,6 milliards de jongles d’affilée (série en cours).
Recalé à l’âge de quatorze ans par le FC Lorient, Jordan Nkololo se lance un défi : jongler jusqu’à ce qu’un club lui offre un contrat professionnel. Il s’illustre devant le centre d’entraînement, été comme hiver, sans jamais poser le ballon à terre, mais aussi autour du stade, dans le centre-ville et les quartiers alentours, au cas où il croiserait par hasard un dirigeant. Au bout de trois ans, Christian Gourcuff l’aperçoit en faisant son marché. Le coach lui dédicace son melon puis s’éloigne.
Déterminé, Nkololo poursuit sa performance dans les lycées, collèges et écoles, les casernes de pompier, les gendarmeries puis les cellules de prison (« trouble à l’ordre public »), accède à la finale de l’émission La France A Un Incroyable Talent et devient le héros d’un épisode de Confessions Intimes. Même s’il n’est toujours pas sous contrat, sa carrière est alors jugée « supérieure à celle de Javier Pastore » par les journalistes sportifs bretons.
Sa soif de revanche tourne à l’obsession : le jeune homme refuse de s’arrêter, ne serait-ce qu’une seconde, et sa mère doit le nourrir, le nettoyer ou lui brosser les dents en plein effort. Pour dormir, il pose sur son ventre la balle qui rebondit sous l’effet de la respiration. Au fil des années, il se perfectionne et parvient à envoyer la sphère rebondissante de plus en plus haut et longtemps, ce qui lui permet de se couper enfin les ongles de pied. En mars 2014, un camion le renverse alors qu’il tend la jambe pour rattraper le ballon lors d’une démonstration effectuée sur une bande d’arrêt d’urgence de l’autoroute A11. Transporté à l’hôpital, il demande une anesthésie locale afin de continuer à jongler pendant l’intervention. Le miracle opère : le chirurgien joue régulièrement au golf avec Jean-François Fortin.
Recruté au Stade Malherbe de Caen, Jordan Nkololo continue malgré tout le football freestyle. Avec un total de 7,6 milliards de jongles consécutives (série en cours), il veut marquer l’Histoire. En trois ans, il ne dispute que vingt-et-un matchs, essentiellement pour des raisons tactiques : un jongleur compulsif n’effectuant aucune passe, il doit évoluer dans un rôle similaire à celui d’Hatem Ben Arfa à Nice. « Artiste de génie » pour les uns (Konbini, les Inrocks, Slate), « petit branleur présomptueux » pour les autres (Valeurs Actuelles, Pascal Praud, Guy Moux), le Caennais divise. Contacté par la sélection algérienne, il choisit finalement de représenter le Congo à la Coupe du monde de foot à un, une variante du foot à cinq avec quatre joueurs en moins et aucun remplaçant. Sacré à la surprise générale meilleur joueur de son équipe, il termine troisième du tournoi.
Le footballeur freestyler ne vit que par le beau jeu. Incompatible avec les schémas cadenassés de notre Ligue 1, il prône le goût du risque, une philosophie du sport imprégnée de romantisme, où le résultat passerait au second plan. Depuis sa naissance, où il jongla avec son cordon ombilical roulé en boule, Nkololo est un habitué des figures artistiques : les fans se souviennent encore de son heel cross-over réalisé sur un fil tendu au-dessus du stade Michel-d’Ornano et de son flip-flap 260 XL supplément frites en direct de Saint-Martin, en plein passage de l’ouragan Irma. Il ne prendra sa retraite qu’après avoir réussi la figure ultime, la plus périlleuse de toutes : un coup du sombrero sur Yannick Cahuzac.
Florian Bifflard
(Photo Benoit-caen / CC-BY-SA 4.0 / Wikimedia Commons)