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Ferri, poteau cadré
- Publié le: 29 août 2014
RANK’N’OL #S03E07. RANK’N’OL #S03E6. Malgré sa victoire à Giugiu (0-1), l’élimination de l’OL contre Astra était trop attendue pour n’y voir qu’un mauvais coup du destin. Si les torts sont partagés, le mérite d’y avoir cru l’est moins. Il a tenu à cinq hommes au profil de sauveur déjà trop désuet pour leur époque. Heureusement pour eux, les losers magnifiques sont aussi des Rank stars éternelles.
Le match : Du repos pour l’OL, un peu moins pour Fournier
Le mode d’emploi : Let’s Rank’n’OL !
1. Jordan Ferri
Il restait 90 minutes à l’OL pour retrouver un niveau qui n’est plus le sien depuis trois matchs. Au lieu de quoi il a fallu s’en remettre au dernier joueur encore en mesure de jouer à un niveau qu’on n’a jamais vraiment voulu lui reconnaître. On aurait pu lui accorder le bénéfice du doute quand il se fend d’une roulette et d’une accélération plein axe (33e), seul moment de grâce recensé dans cette partie, avant que Ghezzal n’expédie l’affaire en un centre vers l’oubli. On préfèrera lui concéder ce qui vaut bien plus que ce brin de talent qu’on a souvent voulu repérer chez d’autres : une volonté de se hisser au-delà de sa condition pour emporter la décision. Les deux fois où l’occasion s’est présentée, c’est à Ferri qu’elle a fini par revenir, la première au terme d’une course qui envoie d’un pointard enragé la balle dans les filets (22e), la seconde sur cette frappe renvoyée par le montant droit de Lung (83e). Preuve que la détermination est encore ce qui se fait de mieux pour sauver l’honneur et s’épargner un retour en blaireau. Pour le reste, il manquera toujours quelques centimètres pour faire basculer son destin de l’autre côté, celui du héros.
2. Anthony Lopes
À l’heure de procéder à l’inventaire des dix-huit années qui ont changé l’histoire du foot à Lyon, difficile de dire qu’Anthony Lopes est un grand gardien. Parce que Lloris, parce que Coupet. Mais Anthony Lopes est un bon gardien. S’il ne rassure pas toujours, il fait peu de fautes. Et il fait des arrêts, comme en font les gardiens des équipes en difficulté, gavés d’opportunités de briller. Ce qu’on pouvait reprocher au Portugone, c’était de ne pas faire cet arrêt qui fait la différence, qui fait gagner ou ne pas perdre. L’arrêt de Lloris, l’arrêt de Coupet. À Giurgiu, il fallait donc être moins sollicité pour s’appliquer à tout sortir (Oros à la 59e, Enache à la 70e). Reste que ses coéquipiers n’ont jamais été capables de mettre ce deuxième but qui en aurait fait enfin l’homme providentiel. De toute façon, ceux qui luttent avec le plus d’ardeur contre le déclin finissent toujours par y être assimilés, aussi injuste soit-il. Et à Giurgiu, Anthony Lopes ne demandait qu’à être un héros. Mais personne n’a répondu
3. Maxime Gonalons
Paraît qu’on reconnaît un Lyonnais à l’autre bout du monde. De l’humour sans doute, à retardement comme on aime le pratiquer entre Saône et Rhône. Parce que tout le monde sait qu’un Lyonnais ne va jamais à l’autre bout du monde. Sans quoi Gonalons serait déjà pris par le bleu intense de la baie de Naples ou par la fièvre qui n’en finit plus de la traverser la ville de part en part, pied au plancher et coups de klaxon pour toute ponctuation. Une élimination plus tard, on pourrait toujours se dire qu’il y avait plein de bonnes raisons de quitter Lyon. Encore fallait-il qu’il y ait de mauvaises raisons d’y rester. La seule qui vaille ne tient ni à ce début de saison mal embarqué, pas plus qu’à la préparation qui ne serait pas compatible avec le haut niveau ou aux retrouvailles de l’ASSE avec l’Europe le soir où l’OL n’y a plus droit. Elle a à voir avec quelque chose de plus profond, le besoin de se sentir plus que lyonnais. L’envie a effleuré Gonalons. Comme toujours, Lyon a fini par le rattraper. Pour le meilleur quand on le découvre en taulier du milieu qui participe à repousser l’idée du grand déclassement qui menaçait ces trois dernières saisons. Pour le pire quand il faut accompagner ce retour dans le rang, quitte à jouer les utilités un cran plus bas parce que la défense est en rade et que la caisse n’y est plus pour tenir son milieu en respect. Sa tendance à jouer de l’anticipation pour limiter les contres roumains qui s’annoncent pourrait laisser croire qu’il n’est pas là vraiment à sa place. En vrai, il n’y a jamais autant été. Parce que sa seule place reste à Lyon.
4. Alexandre Lacazette
À un péno et un Pippo près, le plus grand drame lyonnais des années 2000 restera ce trou en attaque entre 2003 et 2007. « Ah, si Sonny avait eu deux ans de moins… Ah, si Karim était né plus tôt… » On ne se moque pas, on l’a déjà dit nous-mêmes. Et ça ne s’arrangera sûrement pas avec l’âge. Mais comme nous ne sommes pas encore gâteux, on ne s’aventurera pas à raconter qu’Alexandre Lacazette aurait fait la maille. En tout cas pas encore, et certainement pas celui d’aujourd’hui. A le voir esseulé à la pointe de l’attaque, on n’a pu s’empêcher de faire l’analogie. Une comparaison par l’absurde, puisqu’il est clair désormais qu’il n’y a rien qui ressemble moins à un 4-3-3 qu’un 4-3-3. Quand les artistes entouraient un soutier, qu’il l’ait été de gré (Carew) ou de force (Fred), on a assisté sur la pelouse de Giurgiu à l’inverse. Sauf que l’artiste ne pouvait pas faire grand-chose et les soutiers encore moins. Alors, dans un ultime hommage à un cycle qui refermait définitivement sa parenthèse sous ses yeux, le Kid de Mermoz a joué ce rôle de point d’appui. Une mission ingrate dont il s’est acquitté honorablement, mais en vain. Car il était bien là le comble, pour Alexandre Lacazette : être à la fois seul, et mal accompagné.
5. Jean-Michel Aulas
L’OL n’avait pas grand chose à sauver. Un peu d’honneur, ce qu’il s’est appliqué à faire en ramenant une victoire. Pour le reste, il y a l’horreur d’une élimination dans un décor qui cadre forcément avec la disparition de l’empire lyonnais. L’histoire devait s’arrêter là, un peu comme elle avait commencé, du côté des marges, là où les clubs comptent souvent moins que les autres les soirs d’Europe. Maribor pour commencer et Giurgiu pour finir. Entre les deux, on retrouve Jean-Michel Aulas. Et pour tout dire, il semblerait qu’on l’ait perdu. Hier, JMA défiait le destin contrarié de l’OL comme seul un président peut le faire, avec le fric. Aujourd’hui, il doit s’y prendre à la façon de ceux qui ont tout perdu, en racontant des histoires : « Je me suis appliqué à décrire le contexte, à parler d’eux-mêmes, de leurs familles, d’où ils venaient et où ils allaient. J’ai parlé de guerres de religions, de rébellion, de lutte des classes. S’ils veulent que l’Olympique Lyonnais passe pour un blaireau, il ne faut pas exister demain. » (RMC) Ce genre de prédication allumée, on ne l’avait plus entendue depuis Jim Jones ou Loulou Nicollin. On veut bien croire qu’elle ait contribué à entretenir pendant près d’une heure l’idée d’une rédemption qui a fini par foutre le camp pour une tête trop croisée de Koné (27e), une reprise dévissée de N’Jie (78e) ou une frappe de Ferri qui s’écrase sur le poteau (83e). Ce qu’elle raconte surtout, c’est cette atmosphère de fin du monde qui semble régner au sein de l’Olympique Lyonnais. Où la voix de son maître s’est substituée à celle de son entraîneur. Où l’on présente à de jeune pros le monde des hommes comme on le ferait à des enfants. Où les vrais héros finissent toujours seuls au cœur des ténèbres. Apocalypse LOL.
Par Pierre Prugneau et Serge Rezza
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(Photo Frédéric Chambert – Panoramic)