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Bouna Sarr, latéral moderne solitude
- Publié le: 17 mars 2018
INCULTURE FOOT. Passé par le centre de formation de l’OL, Bouna Sarr a dû partir au FC Metz pour jouer en pro. Déjà pas un bon signe. Désormais à l’OM, l’ancien ailier a cette fois dû se reconvertir en latéral pour gagner une place sur le terrain. Il incarne toutes les dérives d’un poste où, horreur suprême, il faut dorénavant savoir jouer au ballon.
L’usine métallurgique de Chivy-lès-Étouvelles est fermée. C’est ici que furent fabriqués la plupart des latéraux de l’équipe de France, dont Lilian Thuram, Bacary Sagna, Éric Abidal et Bernard Mendy. En s’approchant des grilles, on entend parfois rebondir un ballon jadis envoyé au troisième poteau. En 2013, les employés s’étaient mis en grève lorsqu’un repreneur avait voulu racheter l’entreprise afin de forger Layvin Kurzawa. Sur ce secteur sinistré, la moindre nouveauté défraie la chronique. Sorti sur le marché à l’automne 2017, Bouna Sarr a immédiatement séduit les clients de fast-foot par ses courses saignantes et ses tacles 100% Leboeuf. Une contrefaçon signalée par l’association 60 millions de sélectionneurs.
Ailier reconverti, Bouna Sarr profite de l’absence de concurrence pour obtenir une reconnaissance, à l’instar des défenseurs brésiliens, des concepteurs de lunettes WC ou des champions olympiques de biathlon. Cette crise de vocation favorise les opportunistes bien conscients qu’au royaume des aveugles, les borgnes sont rois. Le latéral moderne a suivi les mêmes cours de marketing que cet ex-étudiant en école de commerce désormais propriétaire d’une épicerie vegan à Paris. Le temps des défenseurs durs sur l’homme n’est plus : désormais, le métier attire les offensifs trop mauvais pour exister devant le but, des laissés-pour-compte qu’on aligne à un poste indéchiffrable. À l’époque de Cyril Rool, la donne était simple : le latéral réussissait son match s’il le terminait avec un carton jaune et la jambe d’un adversaire sous le bras. Aujourd’hui, qui est capable de déterminer la valeur de sa prestation ? La philosophie guardiolesque a contaminé le reste de l’Europe, obligeant d’honnêtes citoyens, bouchers de père en fils, à évoluer au-delà de la ligne médiane.
L’avenir s’annonce sombre. La jeunesse décadente perd sa virginité à douze ans, écoute Bigflo et Oli, insulte ses aînés et ne jure que par les attaquants. Lorsqu’un enfant s’écarte de la norme, il est systématiquement humilié par ses camarades, si bien que plus aucun collégien ne souhaite devenir latéral. Excepté un unique spécimen : Baptiste, 14 ans, premier de sa classe au collège Camélia Jordana de Nevers et récemment placé en institut spécialisé. Selon l’équipe de chercheurs qui le supervise, il souffre de troubles graves (sentiment de persécution, hyperactivité, addiction aux réseaux sociaux) qui devraient le conduire à une carrière de terroriste voire, dans le pire des cas, de Patrice Evra.
Florian Bifflard
(Photo OM)