Nice-OL : on Koné la chanson

RANK’N’OL #13. Il n’y en avait donc qu’un seul qui avait compris : une Coupe de la Ligue, ça se perd, et vite si possible. Pour retrouver la splendeur des années Houllier, l’OL a renoué avec ses vieilles habitudes. Et il a trouvé un sabordeur en chef. Car que serait le Rank’n’OL sans ses génies qui déraillent ?

Mercredi 31 octobre 2012, 8ème de finale de Coupe de la Ligue

OGC Nice – Olympique Lyonnais 3-1

Pour Nice : Eysseric (6e), Traoré (9e), Civelli (15e)

Pour Lyon : Gomis (7e)

 

Rank'n'OL Nice-OL

Le mode d’emploi : Let’s Rank’n’OL !

 

1. Bakary Koné : lundi soir, au lendemain du match annulé à Marseille, Barth, bateleur en chef du talk d’OL TV, demande à Bernard Lacombe de venir animer une quotidienne qui menace de s’ennuyer. Comme d’habitude ou presque, le conseiller spécial du président ne se prive pas pour faire le show :

Barth – « Alors, Bernard, on va le jouer quand ce match face à Marseille ?

Bernard Lacombe (sourire en coin) –  On jouera le 28 (novembre)…

Barth – Ça veut dire qu’on va perdre après-demain ?

Bernard Lacombe (sourire toujours en coin) – Oui, c’est possible. Tu sais, Barth, Nice, c’est très fort chez eux… »

Sans cet échange, on aurait pu considérer la partie de Bako Koné pour ce qu’elle fut depuis le bord du terrain : une performance qui trouverait davantage sa place dans une des galeries de la Biennale d’Art Contemporain plutôt que dans un match de foot entre joueurs professionnels. Sauf que derrière les deux passes foireuses envoyées qui manquent de perdre pour toujours le rookie Lopes ou le marquage au hasard qui fout en l’air la défense lyonnaise toute entière, c’est un contrat fixé par la voix de son maître qui est respecté à la lettre. Et comme Koné sait mettre jusque dans ses manqués manifestes le brin d’esthétisme que tant d’autres n’ont pas, on ne manquera pas de lui décerner le prix qui de toute évidence lui revient. Un génie comme seuls savent l’être les plus grands : incompris.

2. Steed Malbranque : la master class continue. Malbranque est, au cœur de l’automne 2012, le meilleur milieu de terrain français. Une sentence qui serait subjective, balancée comme ça, si Malbranque n’avait pas pris soin de valider tous les modules en formation accélée. Milieu défensif : validé ; milieu relayeur : validé ; meneur : validé ; milieu excentré : validé. 4-4-2, 4-2-3-1, 4-3-3, etc. N’en jetez plus : les changements ne nuisent pas à ses performances puisque, de toute façon, c’est lui qui donne un sens à n’importe quelle stratégie. Mais le poste de relayeur droit dans le milieu en losange mis en place par Rémi Garde pendant une heure contre Nice est peut-être son meilleur rôle. Ça tombe bien, c’est aussi le schéma qui paraît le plus adapté à Lisandro et Gourcuff (ou Grenier). Même si, pour cela, il faudra venir à bout du sacro-saint 4-3-3 qui résiste à tous ses assaillants (Perrin, Puel) depuis plus de cinq ans. Pour ça, on demandera à le revoir avec Gonalons lors du prochain cours qu’on devine magistral.

3. Anthony Lopes : personne ne l’avait vraiment vu, mais tout le monde l’aimait déjà. Avant le match, Rémi Garde avait loué ses qualités – « une explosivité très forte, il sent le jeu » –, ne déplorant que ses difficultés sur les sorties aériennes. Et c’est peut-être pour ça qu’il avait choisi de lui offrir le mètre quatre-vingt-quinze de Civelli en guise de baptême de l’air. Toutefois, si le mastoc argentin a bien marqué, c’est du pied. Et c’était surtout pour le troisième but encaissé chez les pros par le jeune Portugais né à Givors, alors qu’il n’avait toujours pas touché un seul ballon… Mais une fois l’élimination acquise, il a pu s’offrir quelques belles parades, dont une des deux poings dans le plus pur style Vercoutre. Car le gosse finira bien par piquer la place du taulier. En ayant l’élégance de lui rendre cet hommage mérité au préalable.

4. Yoann Gourcuff : on guettait du coin de l’œil, non sans fébrilité, son retour dans un décor digne d’Apocalypse Now : temps de mousson, harcèlement des lignes adverses à même de vous plomber le moral et partie qui semble perdue avant de pouvoir se jouer. Yoann aurait pu maudire d’autant plus ce nouveau coup de latte du destin que Rémi Garde lui offrait la meilleure place possible, celle de grand architecte dans un 4-4-2 aux faux airs de losange. Si la caisse a encore du mal à tenir 90 minutes dans des conditions plus favorables à Yannick Aniel qu’à un joueur de foot professionnel, les idées noires n’ont pas encore eu raison de l’ex enfant chéri du foot français pendant ses deux mois et demi d’absence. Jeu tête haute et en première intention, il a fait mieux que tenir sa place. Il s’est même permis d’envoyer un geste rare, déviation de la poitrine en guise de passe déc’ pour Gomis, qui n’aurait pas manqué de faire le régal du suiveur dans d’autres conditions. Jusque dans le chaos, Gourcuff confirme sa renaissance au football. En attendant de pouvoir l’apprécier à sa juste mesure par temps sec et dans un beau milieu, plus tempéré que jamais.

5. Bafétimbi Gomis : c’est l’une des sentences les plus célèbres du foot moderne : « Filippo Inzaghi est né hors jeu. » Sir Alex a pu s’agacer des sales habitudes du dernier grand renard des surfaces de l’histoire, le supporter lyonnais doit, lui, apprendre à vivre avec celles de Bafé. Où, pour reprendre Simone – de Beauvoir, pas Marco, hein… –, on ne naît pas hors-jeu, on le devient. Car, une fois de plus, le temps d’un match passé à patauger dans la gadoue, Gomis ne se révèle jamais aussi décisif que lorsqu’il flirte à la limite des lignes adverses, du mauvais côté si possible. Des deux buts marqués ce soir, on aurait presque préféré voir le second validé plutôt que le premier, juste pour la beauté du mouvement et cet amour de passe envoyée par Steed. De quoi pratiquer un peu plus encore la confusion des genres et se demander si le hors-jeu est bien l’avenir de l’attaquant lyonnais.

Par Pierre Prugneau et Serge Rezza

(Article publié le 31 octobre 2012 sur Rue 89 Lyon)

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